"Violences conjugales" : une expression incontournable? Quels mots pour parler des violences masculines entre partenaires?

Par Roger Herla -avril 2021

Si les violences faites aux femmes, et en particulier les violences entre partenaires, bénéficient d’une reconnaissance grandissante d’un point de vue politique, médiatique et juridique, on constate aussi qu’une approche de ces violences qui se voudrait « neutre » du point de vue du genre reste influente. Dans ce contexte, les mots choisis pour décrire et dénoncer les violences masculines au sein du couple gardent une importance capitale. Justement, quel rôle a joué et joue encore l’expression « violences conjugales » ? D’où tire-t-elle sa puissance et quelles sont ses limites ? D’autres termes seraient-ils plus pertinents ? Et si oui, pourquoi ?

 

 

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Introduction. Chercher les mots justes.

Quand on travaille sur la thématique des liens entre genre et violences conjugales, vient un moment où les mots les plus évidents posent eux aussi question. Que veut dire « violences conjugales » pour celles et ceux qui utilisent ces mots-là ? Y a-t-il un réel accord sur leur sens entre celles et ceux qui en font l’usage ? Le travail mené depuis une vingtaine d’années par des chercheurs‧euses anglosaxons a montré que l’expression « domestic violence » recouvre quant à elle des réalités diverses[1] qui sont plus ou moins liées, selon les situations, « aux relations de pouvoir encore inégales entre les femmes et les hommes »[2]. N’est-ce pas le cas également pour l’expression « violences conjugales » en francophonie ? Et si c’est le cas, est-ce un problème ?

Je me suis rendu compte au fur et à mesure de mes échanges avec des collègues, que ces questions n’entraînent pas de réponses simples, ni de consensus. D’ailleurs, si j’ai été globalement encouragé à réfléchir sur ce sujet tout au long de sa rédaction, cette analyse et son propos ont aussi suscité pas mal de doutes ou d’interrogations chez les relectrices‧eurs. Ce qui m’a obligé à formuler plus clairement l’hypothèse et les questions qui devraient être les fils rouges de ces quelques pages. 

L’hypothèse principale est qu’il se passe quelque chose avec l’expression « violences conjugales ». Qu’elle soit camouflée sous d’autres mots qui lui sont préférés ou au contraire employée dans de multiples contextes où elle désigne plusieurs réalités selon qui en fait usage : son effacement et sa polysémie limitent toutes deux sa puissance dénonciatrice.

Et les questions qui en découlent sont les suivantes : quels mots peuvent nous aider, aujourd’hui encore, à mettre en lumière dans ce qu’elles ont de spécifique les violences faites aux femmes au sein du couple – en particulier hétérosexuel ? L’expression « violences conjugales », justement, garde-t-elle toute sa charge dénonciatrice dans un contexte où la tendance à une approche des violences qui se dit neutre du point de vue du genre, bien que minoritaire, trouve un écho favorable un peu partout, en Europe et ailleurs ? Puisque la mise en lumière des inégalités de genre telles qu’elles se concrétisent au sein des couples reste(ra) nécessaire, pourquoi ne pas privilégier, dès que possible, des termes qui désignent plus clairement les hommes comme auteurs majoritaires des violences entre partenaires, en particulier des plus graves d’entre elles ?

Voyons ensemble ce qu’impliquent de telles questions.

C’est quoi « violences conjugales » ?

L’expression « violences conjugales » accompagne depuis une quarantaine d’années  les mouvements de femmes qui les ont dénoncées et ont réussi à en faire une cause publique. Troublant oxymore dans une société organisée en grande partie autour du mythe d’une conjugalité idéale et du mariage romantique[3], elle succède en fait à une autre expression, très partagée dans les mouvements de femmes belges des années 1970, celle de « femmes battues »[4]. « Violences conjugales » hérite donc de ces mots crus et forts, par lesquels des féministes ont rendu soudain visibles et problématiques des réalités jusque-là cachées et banalisées, faisant du privé un enjeu véritablement politique. Politique au sens où l’analyse féministe confère aux rapports sociaux de genre[5] une importance décisive dans la compréhension des violences au sein du couple et considère les violences que subit une femme de la part d’un homme dans l’espace privé comme faisant partie d’un ensemble plus vaste de violences et de discriminations permettant le maintien du contrôle des unes par les autres.

La définition belge des violences « dans les relations intimes »[6], officialisée par une Conférence interministérielle en 2006, prend en compte les inégalités de genre : elle est de ce point de vue le fruit d’un travail exemplaire de collaboration entre le monde politique et les associations de terrain. Notons bien que même si elle ne fait aucune référence explicite à la conjugalité, c’est bien vers cette définition-là qu’est renvoyée toute personne à la recherche d’une définition belge des violences conjugales : que ce soit par les politicien‧ne‧s qui s’expriment à ce propos ou par les sites internet d’Amnesty International, de la Ligne d’Ecoute Violences Conjugales ou encore du CVFE. On reviendra sur le choix des mots un peu plus loin… mais pour l’instant, l’important est de montrer que les apports féministes sont en apparence bien ancrés socialement.

En effet, même si sur le terrain beaucoup reste à faire en matière de prévention et de suivi des violences conjugales[7], un consensus relativement explicite semble se dégager des bonnes intentions affichées par les pouvoirs publics en ce qui concerne l’application de la Convention d’Istanbul[8] ou encore des réactions médiatiques et politiques aux confinements pour cause de Covid-19 : les « violences conjugales » impliquent avant tout des hommes auteurs de violences sur des femmes et des enfants que la société doit se donner les moyens de protéger et d’accompagner.

Il existe donc à la fois des définitions des violences conjugales intégrant les apports féministes[9] et un apparent consensus social et politique sur l’usage de cette expression. A première vue, on pourrait penser que les luttes féministes ont porté leurs fruits de façon magistrale et que la conception de la violence qui en a émergé fait l’unanimité.

Toutefois, si on observe plus finement les choses, cette première impression doit être fortement nuancée.

Lecture féministe des violences : rien n’est acquis

Tout d’abord parce que, comme le montrent notamment Pauline Delage[10] ou Irène Zeilinger[11], derrière cet accord de façade autour « des violences conjugales », les arguments antiféministes traversent nos sociétés sous différentes formes[12].

A commencer par la défense d’une approche politico-légale des violences dans le couple qui soit « neutre » du point de vue du genre, c’est-à-dire qui considère que les hommes et les femmes sont concerné‧e‧s au même titre (autrement dit, de façon comparable) par les violences au sein du couple, sans que celles-ci doivent être inscrites dans les rapports historiquement inégaux entre femmes et hommes ni, par conséquent, qu’il y ait de différence a priori entre femmes et hommes en termes de violences agies, de conséquences subies ou d’effets de la socialisation de genre. Il s’agit d’une tendance à ne faire référence au genre que pour insister sur l’importance d’offrir aux hommes et aux femmes les mêmes droits[13]. On la retrouve un peu partout dans le monde, des Etats-Unis au Cameroun en passant par la Norvège où, depuis 2010, une conséquence concrète d’une telle politique est l’affectation de 22 des 51 centres spécialisés du pays à l’accueil d’hommes victimes de violences dans leur couple[14]. Si cette logique de neutralité n’est pas comparable en Belgique, le récent Rapport d’évaluation de référence du GREVIO[15] sur l’application par notre pays de la Convention d’Istanbul souligne tout de même que « la neutralité du point de vue du genre de lois, de circulaires ou de plans d’action se prolonge, voire est aggravée par une tendance à mettre sur le même plan symétrique les femmes et les hommes parmi les personnes victimes et auteures des violences couvertes par la convention »[16].

On retrouve cette logique d’effacement des rapports de force structurels entre hommes et femmes en tant que facteurs explicatifs des violences quand l’expression « violences conjugales » elle-même, dont on vient de voir qu’elle a pris son essor avec les luttes féministes, est régulièrement englobée dans celle, plus générale, de « violences (intra)familiales ». C’est notamment le cas en Suisse et… en Flandre. Avec l’avantage d’inclure plusieurs générations dans la problématique et de permettre d’affiner l’approche psychologique des vécus de violence[17] mais l’inconvénient majeur de cacher le fait « que la grande majorité des violences dans l'espace privé touchent de manière disproportionnée les femmes ou que la majorité des agresseurs sont des hommes (…) »[18].

Dans d’autres contextes, c’est l’expression « violences au sein du couple » qui prend le pas sur celle de « violences conjugales ». « L’ouverture du mot ‘couple’ laissant entendre que toute forme d’union – hétérosexuelle ou homosexuelle, durable ou non, consacrée par un statut marital légal ou non, avec ou sans cohabitation des conjoints – mérite examen sur la question des violences, pour la recherche comme pour l’action publique »[19].  Avec pour résultat ici aussi, même si le constat posé est indéniable et important, que la question de la violence masculine et les apports des analyses féministes des violences passent discrètement à l’arrière-plan.

On constate donc que même si la parole des associations et celle des victimes sont aujourd’hui mieux écoutées, en particulier en Belgique, une tendance à la neutralisation des questions de genre et certaines évolutions du langage, même bienvenues, participent à invisibiliser à la fois les spécificités des violences faites aux femmes dans le couple[20] et les rapports sociaux de genre dans lesquels s’inscrivent, parmi d’autres[21], ces violences.

Puissance et limites d’une expression

Or, se positionner face aux discours antiféministes et saper leur influence ou encore lutter, plus largement, contre une dépolitisation de l’analyse et de l’intervention en violences conjugales passe notamment par les mots que l’on choisit et que l’on met en avant. Cela implique donc de se demander quels termes sont les plus justes, aujourd’hui, pour désigner le phénomène de domination masculine au sein du couple.

De ce point de vue, l’expression « violences conjugales » a fait ses preuves, pourrait-on dire, mais n’en reste pas moins ambivalente. Si on tient compte de son histoire, on a vu qu’elle porte en elle une dénonciation implicite des violences masculines au sein du couple hétéro. Mais, du point de vue de la langue française, elle peut tout-à-fait désigner des actes de légitime défense, les violences dans les couples lesbiens ou encore des violences dites « situationnelles »[22], c’est-à-dire où ce qui se joue est un conflit et non une tentative par l’un‧e d’imposer un contrôle général (une domination) sur l’autre. De plus, ce qu’a montré Pauline Delage c’est que la professionnalisation et l’institutionnalisation de la problématique depuis les années 90’, inévitables et bienvenues, portent aussi en elles le risque d’une relative dépolitisation de cette expression, par exemple en favorisant progressivement une approche clinique psychologisante des « violences conjugales ». 

De ce point de vue, en Fédération Wallonie-Bruxelles, les formations données par les Pôles de ressources[23] semblent constituer une garantie de la transmission d’une approche genrée des violences domestiques. Mais il faut souligner que des voix de participant‧e‧s s’élèvent régulièrement pour déplorer (ou en tout cas questionner) la présentation jugée militante ou idéologique qui leur est faite des « violences conjugales ». Minoritaires, comme c’est le cas au niveau du monde politique à l’heure actuelle, ces personnes affirment au fond que l’expression « violences conjugales » ne devrait désigner que… ce qu’elle désigne a priori, soit des violences au sein du couple : n’importe quelle violence dans n’importe quel couple, ponctuelle ou systématique, fondée ou non, selon les situations, sur le genre de la personne (autrement dit : relevant ou non de la violence de genre telle que la définit par exemple le Conseil de l’Europe[24]).

En somme, ces voix minoritaires nous rappellent qu’une fois séparée de son contexte d’origine féministe, l’expression « violences conjugales » continue certes d’interpeller de façon générale sur l’existence de rapports de force dans les relations de couple mais n’en perd pas moins de sa puissance et de son acuité puisque les mots qui la composent sont eux-mêmes neutres du point de vue du genre : ils ne reflètent pas explicitement les violences masculines exercées envers une partenaire.

C’est un peu comme si cette expression était enfermée dans une injonction paradoxale : il est attendu d’elle par certain‧e‧s qu’elle garde sa charge dénonciatrice contre des violences s’inscrivant dans les rapports inégalitaires entre femmes et hommes ; et il lui est demandé en même temps de refléter l’ensemble des violences possibles dans n’importe quelle relation intime. Ce paradoxe apparaît clairement quels que soient les mots choisis, d’ailleurs. C’est notamment le cas dans la définition des violences que s’est donnée la Belgique il y a 15 ans. Sans parler de conjugalité (comme on l’a vu), elle reprend logiquement l’ensemble des actes et attitudes visant au contrôle et à la domination d’un‧e partenaire, quel‧le qu’il‧elle soit,… tout en précisant dans la foulée que « les violences dans les relations intimes sont la manifestation, dans la sphère privée, des relations de pouvoir inégal entre les femmes et les hommes encore à l’œuvre dans notre société. »

Dès lors la notion de « violences conjugales » n’est-elle pas condamnée à rester à la fois :

*trop étroite aux yeux de celles et ceux qui réfutent son héritage féministe ou qui rappellent que des violences pour contrôler et dominer un‧e partenaire peuvent être utilisées par n’importe qui, indépendamment de son genre, de son âge ou de son orientation sexuelle, et

*trop large, tant elle semble pouvoir inclure toutes les formes de violences[25] et tous les couples possibles, pour celles et ceux qui la considèrent avant tout comme un outil de dénonciation des violences masculines dans le couple.

Mais alors ? Quels mots pour le dire ?

« Nommer, on le sait, c’est faire voir, c’est créer, porter à l’existence. »[26]

« La » violence conjugale et « les » violences conjugales ?

Faisons une hypothèse. Pour échapper à l’injonction paradoxale évoquée ci-dessus et à la relative confusion qui peut en découler, mais aussi pour préserver toute la pertinence et la précision des mots employés, différencier la violence conjugale des violences conjugales pourrait s’avérer utile. On aurait alors :

La violence conjugale[27], soit l’ensemble des actes, attitudes, comportements qui participent à entretenir une domination au sein du couple, quel que soit ce couple (hétéro, homo, indéfini).

Les violences conjugales, soit le phénomène social, c’est-à-dire a) le fait que les situations de violence conjugale (au singulier) affectent plus couramment des femmes et que les hommes en soient plus couramment les auteurs et b) le fait que cette domination d’un homme sur une femme dans la vie intime renforce et s’appuie sur des inégalités structurelles persistantes entre femmes et hommes à l’échelle de la société.

Dans ce scénario, « La violence conjugale » est alors une expression ouverte, inclusive, au sens où elle inclut tous les couples possibles. C’est vrai, les situations qu’elle désigne relèvent principalement des violences masculines, mais dénoncer cette réalité ne la concerne pas directement. La dénonciation, c’est l’affaire de la seconde expression : « Les violences conjugales ». Mais elle pourrait aussi passer par le choix de mots plus clairs, plus nets encore.

Cette distinction entre la et les violences conjugales n’est sans doute pas une piste efficace du point de vue du langage quotidien, parlé. On n’imagine pas les journalistes ou les politiques s’approprier une telle différence. Mais elle peut certainement aider celles et ceux qui travaillent sur ces questions ou qui y sont confronté‧e‧s en tant que victimes, auteur‧e‧s ou proches (et ça fait du monde !). Les aider à décortiquer/déconstruire leur expérience. En distinguant ce qui relève de la situation singulière de violence conjugale de ce qui a trait à la situation sociétale dans laquelle elle s’inscrit, celle des violences conjugales.

Si on estime, en étant un poil schématique, que c’est au premier niveau, celui de la violence, qu’interviennent les travailleuses‧eurs sociales‧aux et que c’est au niveau des violences que s’investissent les associations en éducation permanente, en découlent deux (bonnes vieilles) questions-clés : pourquoi et comment continuer de faire lien entre ces deux niveaux ? Autrement dit, pourquoi et comment continuer d’associer une intervention psycho-sociale professionnelle auprès des victimes (comme des auteur‧e‧s, d’ailleurs) avec un travail collectif et politique avec les femmes concernées ?  Nous y reviendrons dans une prochaine analyse.

Machiste, masculine, patriarcale ?

Tous les types de violences entre partenaires méritent évidemment d’être pris en considération et d’être analysés, au besoin, sous un angle socio-politique. Mais, quand c’est l’asymétrie entre les genres que nous voulons pointer du doigt, quand ce sont précisément les violences systématiques exercées par les hommes sur les femmes au sein de relations intimes que nous voulons continuer de déconstruire et dénoncer, pourquoi ne pas les nommer de façon plus explicite, à l’image des féministes mexicaines ou de la Ville de Barcelone[28] qui parlent de « violence machiste » à propos des violences faites aux femmes, et en particulier pour parler des violences entre partenaires. « C’est que tant qu’elle ne porte pas son nom, l’agression perd sa spécificité, peut se confondre avec d’autres agressions (…) »[29]. Tant que l’on nomme ces violences en mettant l’accent non sur l’auteur mais sur le contexte (violences intrafamiliales, violences conjugales), les victimes (« wife abuse » en anglais, violences à l’égard des femmes) ou le motif (violences fondées sur le genre)[30], « cela permet aux hommes en tant que groupe social de se distancier de ces violences et efface leur responsabilité {individuelle mais aussi collective} de mettre un terme aux violences. Les violences deviennent ainsi un problème des femmes. La manière de parler, et donc de (se re-)présenter les violences faites aux femmes a des conséquences pratiques. »[31]

Dès lors, nous pouvons nous aussi faire le choix d’utiliser des mots aussi forts qu’explicites.

Pourquoi ne pas parler de « violence masculine en contexte de couple[32] hétérosexuel »[33] ou, plus simplement, de « violence machiste dans le couple » pour désigner une forme de domination par le contrôle et par la contrainte (ou la coercition[34]), que celle-ci soit physique, psychologique ou encore économique ? Pour désigner une domination qui s’exerce au niveau relationnel, dans les interactions entre deux partenaires hétérosexuels, mais qui s’appuie sur le pouvoir plus vaste et plus diffus que donnent aux hommes, à un niveau institutionnel[35], les inégalités et les stéréotypes de genre qui persistent dans nos sociétés.

Normes, inégalités et violences sont liées

Le niveau de réalité dit institutionnel - qui reprend à nos yeux « non seulement de vastes ensembles comme la justice ou la famille (…) mais également les valeurs, les usages, les modes, les croyances[36] - est délicat à appréhender. Notamment parce qu’une mesure précise des effets et de l’évolution des normes est en soi un défi.

Mais des études sérieuses se penchent régulièrement sur la question, dont celle, ambitieuse, qu’a publiée récemment le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD)[37].

Intitulée « Combattre les normes sociales », cette étude rappelle notamment que les individus se comportent en fonction d’idéaux associés à leurs identités sociales, et en particulier à leur identité de genre, et qu’ils attendent de celles et ceux qui partagent avec eux une identité commune qu’ils‧elles se comportent également en fonction des idéaux socialement dominants. Dès lors, les normes, en dessinant ce qui est considéré comme acceptable ou au contraire dénigré, influencent les attentes en termes de comportements masculins et féminins. Et (dé)limitent donc directement les choix individuels, les libertés et les capabilités[38] de chacun‧e.

Plus concrètement, l’étude menée par le PNUD à l’échelle de 75 pays démontre que 91% des hommes et 86% des femmes expriment au moins un préjugé clair allant à l’encontre de l’égalité entre les genres concernant des domaines tels que la vie politique, l’économie, l’éducation, les droits des femmes à disposer de leur corps… et la violence au sein du couple.

Concernant cette dernière, qui nous intéresse ici tout particulièrement, il s’avère que pas moins de 30% des personnes interrogées, femmes et hommes confondu‧e‧s, pensent qu’il est justifié dans certaines circonstances qu’un homme batte sa partenaire.

Ces quelques éléments dévoilent une partie du contexte idéologique dans lequel les violences conjugales sont agies. Plus ou moins ancré selon les régions et les populations mais bel et bien transnational, transclasses et transcommunautaire, on mesure à quel point ce contexte n’est ni neutre ni définitivement gagné à la cause de l’égalité de genre, loin s’en faut.

Mieux dire pour mieux agir ?  Se confronter aux questions de fond

Préférer parler dans certains contextes de violence « masculine », « machiste », voire « patriarcale » n’aurait pas pour but de signifier que tous les hommes exerce(ro)nt de la violence dans leurs relations intimes ni que les femmes n’en exercent jamais.

En pointant du doigt l’auteur, la violence masculine qu’il incarne par ses actes ainsi que le caractère genré des violences domestiques, il ne s’agit pas non plus de nier toute forme de responsabilité, donc de pouvoir, aux victimes et aux femmes en général. Encore moins de vouloir tout expliquer par les rapports sociaux de genre. En l’occurrence, la violence conjugale se joue entre deux personnes qui ont noué des relations affectives souvent fortes et complexes : chaque situation est unique et mystérieuse et mérite une attention toute singulière de la part de l’ami‧e, du/de la parent‧e ou de l’intervenant‧e qui cherche à aider ou à comprendre.

Mais le choix d’un vocabulaire centré sur l’auteur permettrait de rappeler avec simplicité que les violences qui relèvent d’un processus de domination de la partenaire sont hyper-masculinisées : dans le double sens où elles sont agies majoritairement par des hommes et où les actes par lesquels elles passent (mise sous tension, menaces, répression et mépris des émotions, passage à l’acte physique, contrôle) restent au moins partiellement associés à la construction culturelle d’une identité virile[39] et de formes de masculinité « traditionnelles »[40].

Un langage plus frontal devrait alors inciter celles et ceux que cela intéresse ou qui ont des responsabilités dans ce domaine à se confronter à des questions-clés appelées à devenir une priorité pour notre société entière : quelles sont les habitudes de comportements, les propos dégradants banalisés, les humiliations déguisées, les émotions enfouies et niées, les chemins d’empathie méprisés, les croyances et les stéréotypes stigmatisants[41], … qui mènent en bout de course à ce que ce soit des hommes qui soient autorisés (voire encouragés) et qui s’autorisent à imposer un contrôle coercitif à une partenaire intime, comme si celle-ci leur appartenait (son corps, son temps mais aussi le travail gratuit qu’elle fournit) ? Si on ne naît pas homme mais qu’on le devient : comment devient-on ces hommes-là ?[42] A quel point ce devenir-homme-là, cette masculinité-là, sont-elles nécessaires au capitalisme néolibéral mondialisé qui repose sur la concurrence généralisée, des inégalités sans limites, l’exploitation suicidaire des ressources terrestres, la consommation addictive et la domination des un‧e‧s par les autres ?[43] Puis, surtout, comment pouvons-nous collectivement nous donner les moyens de nous attaquer plus fermement et avec plus d’ambition au terreau dans lequel s’enracinent les violences de genre en général et les violences masculines au sein du couple en particulier ?

Bien entendu il faut affiner le Droit et continuer à la fois d’imaginer de nouvelles façons de rendre la justice[44] et de penser, le cas échéant, à des sanctions qui fassent sens (notamment pour les victimes), bien sûr il faut plus que jamais renforcer les lignes d’urgence et les refuges, soutenir le travail social auprès des femmes, des hommes et des enfants concerné‧e‧s et généraliser la formation des policier·es et magistrat·es,… Mais il y a aussi une société à transformer en profondeur, notamment en ce qui concerne les manières d’envisager des relations amoureuses en dehors du contrôle ou dans les façons dont nous valorisons ou au contraire refusons d’être un homme (« un vrai ! »), une femme ou d’un autre genre.

Si nous ne sommes pas capables de nous saisir à bras le corps de ces diverses questions liées à la construction de la virilité[45] et plus largement aux normes de genre susceptibles de générer de la violence, en d’autres termes si nous négligeons la prévention primaire[46], la mission semble impossible, perdue d’avance : nous nous condamnons aux belles intentions et aux réformes sans ambition, nous nous condamnons à tenter de réparer sans cesse des dégâts humains majeurs provoqués par la violence masculine dans les relations intimes tout en laissant leurs causes profondes intactes.

Pour conclure

Le choix des mots pour désigner les violences, n’importe quelle violence, est important. C’est le cas évidemment pour les violences faites aux femmes et en particulier pour les violences entre partenaires. Selon les choix que nous posons, les mots mettent en lumière la réalité sous différents angles, en occultant plus ou moins fortement les personnes auteures des violences et par conséquent les formes de domination qu’elles entretiennent trop souvent.

Nous avons vu ensemble que l’expression « violences conjugales » possède toujours une certaine force dénonciatrice, grâce à son héritage féministe, mais aussi, d’une part, qu’elle peut susciter aussi une certaine confusion quant à ce qu’elle signifie exactement et, d’autre part, qu’elle ne dit rien sur le caractère majoritairement masculin des violences qu’elle désigne.

Or, si, comme l’affirme Valérie Rey-Robert et beaucoup d’autres avec elles, des changements importants en matière de violences contre les femmes demandent un ambitieux travail de prise de conscience et d’éducation, celui-ci passera qu’on le veuille ou non par le choix de mots clairs et forts pour dénoncer la violence masculine. Avec pour objectif non pas la stigmatisation de chaque homme en tant qu’homme mais, au contraire, le fait que de plus en plus d’hommes se saisissent à leur tour du problème de la prévention des violences et prennent leur part dans le travail de conscientisation et d’éducation en question.

Cette question de vocabulaire compte d’autant plus qu’il existe un lien fondamental, comme le précise le rapport du GREVIO[47], entre le fait « de promouvoir une approche et un langage communs en matière de violences faites aux femmes » et le fait d’adopter « des mesures et des outils (par exemple pour les actions de prévention et de formation) permettant une lecture systématique des violences sous l’angle des rapports sociaux de sexe, ce, de manière partagée entre tous les acteurs et les actrices concernés, notamment l’État fédéral, les entités fédérées, les associations et les universitaires spécialisés ».

Ce texte-ci, lui, s’inscrit dans une recherche plus large en éducation permanente autour de l’analyse féministe des violences au sein des couples[48]. En portant un regard critique et curieux sur les « mots pour les dire », il montre l’intérêt de travailler à un glossaire sur les violences conjugales.

Ce travail de définition sera intimement imbriqué à l’engagement personnel et/ou professionnel de celles et ceux qui s’y essayeront.

Car chercher et réfléchir collectivement à ce que signifie tel mot ou telle expression, pour les autres (les instances publiques telle la Convention d’Istanbul mais aussi Wikipédia par exemple) et surtout pour nous-mêmes, puis décider des mots que nous choisissons d’employer et de ceux dont au contraire nous ne voulons pas, revient rapidement à devoir se positionner, à assumer une certaine vision du monde et des rapports de force qui le traversent.

Alors ? Pourquoi et dans quel contexte utiliser les termes de violences… “faites aux femmes”, “de genre”, “conjugale”, “conjugales”, “domestique”, “intrafamiliales”, machiste”, “patriarcale” ou “masculine” ? Les mots que l’on choisit jouent un rôle central dans la façon dont on se représente le réel et dont on va ou non être en mesure d’agir sur lui, individuellement et collectivement. Les mots sont politiques.


Pour citer cette analyse :

Roger Herla, "Violences conjugales / Violences machistes. Quels mots pour parler des violences masculines entre partenaires?" Collectif contre les violences familiales et l’exclusion (CVFE asbl), novembre 2020. URL : https://www.cvfe.be/publications/analyses/362-violences-conjugales-une-expression-incontournable-quels-mots-pour-parler-des-violences-masculines-entre-partenaires

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Avec le soutien du Service de l’Education permanente de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la Wallonie.


Notes :

[1] Lire par exemple à ce propos Jean-Louis Simoens, « Avantages et limites d’une classification : l’exemple des violences conjugales », Publications CVFE 2017, https://www.cvfe.be/publications/analyses/89-avantages-et-limites-d-une-classification-l-exemple-des-violences-conjugales.

[2] Pour citer la définition belge officielle, dont il sera question un peu plus bas.

[3] « Conjugalité » signifie selon le Larousse : « situation de quelqu’un qui est marié ».

[4] Le Collectif contre les Violences Familiales et l’Exclusion s’est longtemps appelé Collectif Femmes Battues et le slogan « Nous sommes toutes des femmes battues » était scandé dans les manifestations.

[5] C’est-à-dire la façon dont tout un système complexe de représentations, d’attitudes et de rôles attendus ou encore de sanctions sociales liées au genre (donc à la distinction entre masculin et féminin) construisent notre façon de ressentir et d’agir dans le monde selon que l’on soit considéré comme femme ou comme homme. Et en particulier dessinent les possibilités et privilèges de chacun‧e en ce qui concerne les relations publiques ou privées entre femmes et hommes.

[6] « Les violences dans les relations intimes sont un ensemble de comportements, d’actes, d’attitudes de l’un des partenaires ou ex-partenaires qui visent à contrôler et dominer l’autre. Elles comprennent les agressions, les menaces ou les contraintes verbales, physiques, sexuelles, économiques, répétées ou amenées à se répéter portant atteinte à l’intégrité de l’autre et même à son intégration socioprofessionnelle. Ces violences affectent non seulement la victime, mais également les autres membres de la famille, parmi lesquels les enfants. Elles constituent une forme de violence intrafamiliale. Il apparaît que dans la grande majorité, les auteurs de ces violences sont des hommes et les victimes, des femmes. Les violences dans les relations intimes sont la manifestation, dans la sphère privée, des relations de pouvoir inégal entre les femmes et les hommes encore à l’œuvre dans notre société. »

[7] Comme le montre le Rapport alternatif d’évaluation de la mise en œuvre en Belgique de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul, disponible ici : https://www.amazone.be/wp-content/uploads/2019/02/19rapportalternatif.pdf

[8] Cf. note précédente.

[9] C’est le cas en Belgique, donc, mais également au niveau d’instances internationales telles que l’ONU, l’OMS ou le Conseil de l’Europe via sa Convention sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul).

[10] Pauline Delage, « Violences conjugales. Du combat féministe à la cause publique », Presses de Sciences Po, 2017.

[11] Irène Zeilinger, « ‘Oui, mais les hommes aussi’. La neutralité de genre dans la lutte contre les violences, question d’équité ? », Publication de l’asbl Corps écrits, 2018, https://entreleslignesentrelesmots.files.wordpress.com/2019/12/oui-les-hommes-aussi-etude-corps-ecrits-compresse.pdf

[12] Lire aussi à ce propos R. Herla « Comprendre et combattre les violences conjugales : les lunettes de genre face aux antiféminismes », Publications CVFE, 2020, https://www.cvfe.be/publications/analyses/336-comprendre-et-combattre-les-violences-conjugales-les-lunettes-de-genre-face-aux-antifeminismes .

[13] Voir par exemple R.Herla « Pour une lecture de genre et un féminisme subversifs », Publications CVFE, 2019, p.6 et sv., https://www.cvfe.be/publications/analyses/305-pour-une-lecture-de-genre-et-un-feminisme-subversifs

[14] Irène Zeilinger, op‧cit., p.10. L’auteure souligne que les infrastructures proposées aux hommes sont très nettement supérieures aux besoins réels de la population masculine.

[15] Groupe d’experts sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.

[16] Rapport de référence du GREVIO pour la Belgique, sept 2020, p.14 : https://rm.coe.int/rapport-du-grevio-sur-la-belgique-/16809f9a2b

[17] Voir Roger Herla, « Comprendre et combattre les violences de genre… », op‧cit. p.11.

[18] Irène Zeilinger, op‧cit., p.59.

[19] Catherine Cavalin, Mark Rosenberg, https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02186344/document

[20] Comme d’ailleurs de celles faites aux hommes, nous dit Irène Zeilinger, op‧cit‧p.59.

[21] Le genre n’est évidemment pas le seul facteur qui puisse aider à interpréter/expliquer les violences : les relations de couple sont traversées également par des enjeux de classe, de race, d’âge, de religion ou encore d’histoire familiale (maltraitance, abus) et individuelle (addictions,…).

[22] Le terme fait référence à la fameuse typologie de Michael P. Johnson. Lire par exemple à ce propos « Les types de violence familiale », dans Violences envers les femmes : Réalités complexes et nouveaux enjeux dans un monde en transformation, sous la dir. de M. Rinfret-Raynor, É. Lesieux, M.-M. Cousineau, S. Gauthier et E. Harper, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2013, pp.15-32.

[23] L’offre de formation des Pôles de Ressources spécialisées en Violences Conjugales et Intrafamiliales est ici : http://violencesconjugales.eu/Offre_formation_pole.pdf?PHPSESSID=7899fc5274d9fce191f6e94457bc6081

[24] « La violence fondée sur le genre désigne tout type d’acte préjudiciable perpétré contre une personne ou un groupe de personnes en raison de leur sexe, de leur genre, de leur orientation sexuelle et/ou de leur identité de genre, réels ou perçus. » Et plus spécifiquement, «Le terme ‘violence à l’égard des femmes fondée sur le genre’ désigne toute violence faite à l’égard d’une femme parce qu’elle est une femme ou affectant les femmes de manière disproportionnée » :  https://www.coe.int/fr/web/gender-matters/what-is-gender-based-violence

[25] Elle peut potentiellement contenir les violences symétriques entre partenaires (aussi nommées violences bi-directionnelles ou double domination) ou celles de femmes envers leur (ex-)compagnon ; tout comme elle pourrait désigner des faits de violences isolés, qui ne se répéteront pas… autant que des violences systématiques s’inscrivant dans un rapport de force.

[26] Pierre Bourdieu, « Sur la télévision », Raisons d’agir, 1996.

[27] Cette définition de la violence conjugale s’inspire du site de SOS violence conjugale au Canada https://sosviolenceconjugale.ca/fr/outils/sos-infos/violence-conjugale-violence-dans-les-relations-intimes-violence-dans-les-relations-amoureuses-c-est-quoi-au-juste

[28] https://ajuntament.barcelona.cat/bcnantimasclista/es/detectar-la-violencia-machista/como-saber-si-sufres-violencia-machista

[29] Virginie Despentes, « King Kong Théorie », Poche, 2007, pp.41-42.

[30] Lire aussi à ce sujet le bel article de Ailbhe Smyth, « Résistance féministe à la violence masculine contre les femmes. Quelles Perspectives ? », Nouvelles Questions Féministes, 2002/2 (Vol. 21), pp.76-92. DOI : 10.3917/nqf.212.0076. URL : https://www.cairn.info/revue-nouvelles-questions-feministes-2002-2-page-76.htm

[31] Irène Zeilinger, op‧cit, p.15. Lire aussi à ce propos Valérie Rey-Robert, « Le sexisme une affaire d’hommes », Libertalia, 2020, pp.97-98.

[32] On choisit de garder ici le mot « couple » non pas pour signifier que l’homme ou la femme vivent sous le même toit (comme le précise les définitions du dictionnaire) mais pour insister sur la durée de la relation, qui peut être brève mais qui est indispensable pour que s’installe le rapport de domination dont il est question ici.

[33] H. Andriamandroso, «  La violence conjugale : une cible privilégiée des discours masculinistes en France et en Espagne », extrait de « Antiféminismes et masculinismes d’hier et d’aujourd’hui », sous la dir. de Christine Bard, Mélissa Blais, Francis Dupuis-Déri, Puf, 2019, pp.385-409.

[34] Voir Ewan Stark, « Une re-présentation des femmes battues. Contrôle coercitif et défense de la liberté », extrait de « Violences envers les femmes : réalités complexes et nouveaux enjeux dans un monde en transformation », Maryse Rinfret-Raynor et col. (sous la dir. de) Presse Universitaire du Québec, 2013, pp.33-52.

[35] Les notions de niveaux relationnel et institutionnel sont empruntées à la grille d’analyse des situations sociales que Jacques Ardoino (pédagogue français décédé en 2015) a créée dans les années 1970. Il avait repéré et défini 5 dimensions utiles pour saisir les nuances d’une situation et tenter d’y apporter du changement : individuelle, relationnelle, groupale, organisationnelle et institutionnelle.

[36] Claudine Drion et Gérard Piroton, « Genre et niveaux d’intelligibilité du social », 2005. Article disponible sur le site du Monde selon les Femmes : https://studylibfr.com/doc/2656340/genre-et-niveau-de-compr%C3%A9hension-du-social)

[37] « Tackling social norms. A game changer for gender unequalities », publié conjointement par le PNUD et l’équipe responsable du rapport sur le développement humain des Nations Unies et disponible ici : http://hdr.undp.org/sites/default/files/hd_perspectives_gsni.pdf

[38] Les capabilités d’une personne renvoient à ce qu’elle a réellement la possibilité de choisir d’être et de faire dans le contexte politique et social qui est le sien. Autrement dit à sa liberté. Qui peut aller des besoins fondamentaux (se nourrir, rester en vie) aux fonctionnements les plus complexes (participer à la vie politique et sociale).

[39] Lire à ce propos Lucie Peytavin, « Le coût de la virilité », Ed. Anne Carrière, 2021. On pourrait aussi

[40] On pourrait aussi parler de masculinité hégémonique, d’après le concept de la sociologue Raewyn Connell, qui désigne non pas une forme précise de masculinité mais la façon dont différentes formes de masculinité s’imposent selon les époques et les contextes avec comme point commun des effets de domination externes (envers les femmes) et internes (envers certains hommes). Lire à ce propos les quelques pages que l’association Le Poisson sans Bicyclette consacre au sujet dans un outil pédagogique intitulé « Construire une approche féministe des masculinités » : http://www.lepoissonsansbicyclette.be/wp-content/uploads/2019/01/Outil_p%C3%A9dagogique.pdf

[41] La Convention d’Istanbul sur les violences faites aux femmes et aux jeunes filles appelle à une approche globale des violences par les Etats membres impliquant notamment la lutte contre la persistance « de stéréotypes fondés sur le sexe qui sont préjudiciables aux femmes ».

[42] Un début de réponse à cette question avec cet article des Grenades de la RTBF, daté de l’été 2020 : https://www.rtbf.be/info/dossier/les-grenades/detail_deconstruire-les-masculinites-toxiques-3-4-on-ne-nait-pas-homme-on-le-devient?id=10551329

[43] Lire à ce sujet dans « Pax Neoliberalia. Perspectives féministes sur (la réorganisation de) la violence », Ed. iXe, 2016, les analyses de Jules Falquet sur « la guerre de basse intensité » livrées par des hommes contre les femmes en Amérique Latine et ailleurs, pour le plus grand bénéfice des entreprises multinationales. Ou l’interview de Silvia Federici dans la revue en ligne Ballast, « Le féminisme d’Etat est au service du développement capitaliste » : https://www.revue-ballast.fr/silvia-federici-le-feminisme-detat-est-au-service-du-developpement-capitaliste/, publiée le 15 avril 2020, Ou encore Roger Herla, « Femmes et précarité en contexte néolibéral », Publications CVFE, 2016, disponible sur notre site.

[44] A propos d’alternatives à la justice pénale, lire Gwenola Ricordeau, « Pour elles toutes. Femmes contre la prison » et en particulier le chapitre 6 « S’émanciper du système pénal et construire l’autonomie », pp.177-206, Lux, 2019.

[45] Lire Valérie Rey-Robert, « Le sexisme, une affaire d’hommes », op‧cit. En particulier les deux premiers chapitres.

[46] Lire à ce propos sur le site de l’asbl Garance « Prévenir les violences en temps de crise » : http://garance.be/spip.php?article1325

[47] Rapport de référence du GREVIO pour la Belgique, sept 2020, op‧cit., p.15.

[48] Comme en attestent les différentes publications du CVFE citées au long de l’analyse.